Des recommandations sur l'organisation des Eaje

Le rapport Giampino, remis le 9 mai à la Ministre de la famille, propose une vision réactualisée sur ce que devraient proposer, qualitativement et en accord avec le développement et l’épanouissement des jeunes enfants, les modes d’accueil.

Ce rapport, basé sur l’état des connaissances actuelles sur le développement et les besoins du tout-petit, propose, entre autres : 

LA PLACE DU JEUNE ENFANT DANS LA SOCIÉTÉ

Le rapport dénonce l’absence de place faite au tout-petit dans notre pays, hormis les structures d’accueil qui lui sont dédiées. Rien n’est prévu ou adapté à eux, nécessitant une contenance permanente des adultes les accompagnant : bras, poussette, écharpe.

“Promouvoir un véritable droit à l’accueil éducatif dans son environnement suppose de disposer de modes d’accueil inconditionnels : dans des espaces publics ou ouverts à tous publics, des accueils réellement gratuits et ne nécessitant aucune inscription préalable ou conditionnelle”. Il s’agirait donc de lieux “d’accès à l’éveil” accessibles à tous.

La mission préconise également d’ouvrir les modes d’accueil aux fratries, surtout en cas de précarité.

Est confirmé également l’une des missions que le gouvernement a souhaité conféré aux modes d’accueils : celui de permettre de concilier vie professionnelle et vie personnelle, et plus précisément, permettre le retour à l’emploi de l’un ou des deux parents.

DES MODES D'ACCUEIL PERSONNALISANTS ET LUDIQUES

Consciente de l’augmentation des contraintes administratives et budgétaires qui pèsent sur les crèches (ou les contraintes familiales chez les assistantes maternelles), Sylviane Giampino insiste sur la priorité de l’une des valeurs solides en France dans les pratiques : l’accueil personnalisé et sécurisant de chaque enfant, qui passe par des liens, des lieux et des rythmes stables.

Pour cela, gestionnaires et équipes doivent placer “la focale sur l’organisation de vie des enfants et non sur l’organisation de vie des adultes”.

La mission fait ouvrir les yeux sur un autre aspect des lieux d’accueil où les locaux, les jeux, les décorations sont uniformisés, ne laissant la place ni à la personnalisation ni à la découverte. “Or, des lieux et des objets ‘’aseptisés’’ génèrent des échanges ‘’aseptisés’’, préjudiciables à la personnalisation et à l’expression : les modes d’accueil perdent leur dimension « lieu de vie des enfants et lieu social ». Si les locaux ne portent pas la marque de l’investissement des adultes, si ceux-ci ne s’approprient pas les objets, une part de la transmission sensible du plaisir et de l’intérêt entre les adultes et les enfants sera absente.” Le retour aux objets bruts ou à fabrication artisanale par les professionnels est donc à encourager.

“Il est nécessaire d’accorder à l’enfant confiance, liberté de circulation, accès aux jeux dans des espaces préparés et conçus pour lui. Le mode d’accueil est un espace vivant.” Il doit être penser et organisé comme un environnement permettant la découverte, la motricité et la confiance en l’enfant, à tout instant.

 Tout en proposant un aménagement, des objets, des activités répondant à la vitalité des enfants, ils doivent cependant conserver la liberté de ne rien faire, de se trouver des endroits tranquilles ou simplement de prendre le temps qu’il leur est nécessaire pour faire ce qu’ils ont à faire.

Pour finir sur ce point, les spécialistes de cette mission ont pointé un élément qui est peu souligné dans les réflexions pédagogiques : les professionnels peuvent et doivent s’amuser. Le plaisir est une émotion qui, comme toute émotion, est contagieuse.

Le poids des réglementations actuelles, ne laissent malheureusement plus la place à l’enfant comme aux accueillant(e)s d’exercer leur vitalité, leur créativité.

L’éveil au monde

La mission refait le point sur l’importance du langage avec le tout-petit :

  • Le langage sous toutes ses formes : verbale, paraverbale, non verbale
  • Le non sens du parler-groupe (où la relation individuelle n’a pas de place)
  • Le danger des tablettes ou des méthodes de stimulation
  • Ne pas se noyer dans un bain de paroles (laisser à l’enfant le temps de former son propre message)

L’éveil passe également par l’art qu’il est possible de relier simplement à la vie quotidienne des enfants.

L’ouverture à l’interculturalité permet à l’enfant de s’ouvrir à d’autres façons d’être, de faire, de parler. Cela n’est possible qu’en l’absence de tout jugement de valeur sur les cultures différentes de la nôtre.

La mission relance également l’attention à porter sur la représentation sexuée des enfants permettant de leur laisser expérimenter et vivre à leur façon ce qui culturellement relève de l’un des deux genres (fille-garçon).

DES MODES D'ACCUEIL PLURIDISCIPLINAIRES, OUVERTS À LA DIVERSITÉ ET INNOVANTS

LES PRATIQUES DES PROFESSIONNELS

Sont rappelés dans ce chapitre quelques principes de base :

  • Entre familiarité et altérité : la fonction entre-deux des accueillants entre la famille et la société
  • La congruence : l’importance que ce qui est exprimé soit authentique car les enfants perçoivent finement l’état interne des autres
  • L’observation interactive et partagée
  • Le travail sur la résonnance, nécessitant des temps de réflexion en réunion, formation, analyse de pratiques
  • Rester à sa place de professionnel en laissant la place aux parents

LE FONCTIONNEMENT DES ÉQUIPES

La base en EAJE est le projet d’établissement. Celui-ci se définit collectivement en fonction du cadre, des valeurs et des pratiques communes.

  • En reprenant les éléments identifiés comme fondamentaux par la mission
  • En institutionnalisant des analyses de pratiques (pour réfléchir sur les comportements et réactions de chacun)
  • En promouvant le travail participatif

La présence d’un référent psychologue parait essentiel dans ce rapport : les non-dits, la résonance interne, les risques de maltraitance institutionnelle peuvent être évacués en la présence d’un tiers.

 

Les assistantes maternelles sont également intégrées dans ce processus où le projet d’accueil est selon ce rapport, à généraliser, avec l’aide de la PMI ou des RAM. L’accompagnement de ces professionnels reste grandement à développer et encadrer.

La mission a bien évidemment identifié l’impact de la gestion administrative et financière sur la qualité d’accueil en EAJE.