Des préconisations pour la Petite Enfance

Article mis à jour le 22/07/2018 : 

Agnès Buzin a signé la Convention d’Objectifs et de Gestion 2018-2022 dont les points principaux sont :

  • Application de bonus handicap, mixité sociale et territoire
  • Augmentation de 2% par an des participations familiales en crèche
  • Très faible augmentation de la PSU
  • Arrêt des subventions d’investissement pour les micro-crèches hors zones prioritaires
  • Simplification du parcours administratif des porteurs de projet
  • Objectif de création de :
    • 30 000 EAJE (Etablissement d’Accueil du Jeune Enfant)
    • 1 000 RAM (Relais d’Assistants Maternels)
    • 500 LAEP (Lieu d’accueil Enfants Parents )

 

Pour en savoir plus sur le contenu de la COG 2018-2022, lisez mon article.

La nouvelle Convention d’Objectifs et de Gestion 2018-2022 pourrait suivre certaines préconisations du Haut Conseil de la Famille, de l’Enfance et de l’Age (HCFEA)

Le rapport du HCFEA

Publié en avril 2018, le rapport du HCFEA sur l’accueil des enfants de moins de 3 ans retranscrit toutes les inflexions que pourraient prendre les différents acteurs afin de soutenir ou au moins de maintenir l’offre d’accueil, toujours en deçà des besoins des familles.

Il y a identifié les enjeux, les freins et les leviers d’amélioration quantitative et qualitative, en se référant largement au rapport Giampino.

Du côté qualitatif

Les leviers d'amélioration de la qualité d'accueil

Le développement de la qualité d’accueil occupe une large place dans ce rapport avec une multitude de points :

  • Historiquement parlant, il commence par l’action de la PMI confrontée au manque de moyens et d’importantes inégalités territoriales. Le rapport insiste donc sur l’importance d’une visite minimum par an des EAJE et Assistants Maternels.

 

  • L’offre de formation y est estimée insuffisante, mal adaptée et mal coordonnée. La refonte des diplômes est en cours mais le rapport ajoute des bonnes pratiques locales à dupliquer en direction des assistants maternels et auxiliaires parentaux (livret de professionnalisation, stages en EAJE, identification des espaces que les enfants peuvent fréquenter sur une commune). Ici, l’exemple du plan de la Mairie de Paris sur l’accueil individuel.

 

  • “L’intégration d’un fonctionnement collectif au sein des modes d’accueil individuel, qu’offrent les RAM, les accueils en Mam ou en crèche familiale peuvent ainsi constituer en eux-mêmes un moyen d’accroître la qualité de ces modes d’accueil, sous réserve que ce qui est proposé dans le cadre de ce temps collectif et les modalités de cet accueil soient eux-mêmes de qualité.” Pour cela, des pistes inédites sont dévoilées :
    • Inscription obligatoire de tout professionnel de l’accueil individuel en RAM, avec incitation financière
    • Diminution du ratio de professionnels par RAM
    • Création d’un diplôme spécifique d’animation de RAM, d’un nouveau nom : “coordinateur”
    • Renforcement de leurs missions de professionnalisation ainsi que d’éveil et de socialisation
    • Augmentation du nombre de MAM signataires de la charte de qualité (5 % des MAM l’ont fait)
    • Expérimentation de solutions hybrides, entre accueil collectif et individuel

 

  • Pour les enfants en situation de préscolarisation, réfléchir la qualité de l’accueil en :
    • Associant professionnels de l’accueil du jeune enfant et de l’éducation nationale sur des principes communs et des actions partagées
    • Mettant en place des financements supplémentaires pour les communes classées en REP
    • Ajustant la formation des professionnels (enseignants et ATSEM) à ce public
    • Mobilisant les parents en tant que partenaires

 

  • Inverser la logique : articuler les modes d’accueil en fonction des besoins des enfants et des attentes des familles 
    • Relancer les modes d’accueil collectifs “intermédiaires” (jardins d’enfants, classes passerelles, jardins d’éveil)
    • Rapprocher l’école des EAJE et accueils individuels
    • Échelonner les entrées à la maternelle
    • Relever le seuil d’âge pour le Complément Mode de Garde (CMG)

Favoriser une égalité d'accès des familles aux différents modes d'accueil

“Une plus grande égalité d’accès des familles à tous les modes d’accueil suppose de garantir autant que faire se peut :

  • une égalité d’accès financière
  • une égalité d’accès territoriale
  • une égalité d’accès de toutes les familles à tous les modes d’accueil, quelle que soit la situation familiale et professionnelle des parents (niveau de revenus, situation et statut professionnel -parent actif occupé, à temps plein ou temps partiel, en recherche d’emploi ou non-actif, parent travaillant en horaires normales ou atypiques -, situation matrimoniale – parent seul ou en couple-) et quelle que soit la situation de l’enfant (notamment enfant porteur de handicap)”.

Les actions proposées sont de :

  • Rapprocher les restes à charge (RAC) et les taux d’effort des familles entre les types d’accueil :
    • Réduire l’écart du RAC entre l’assitante maternelle et la crèche collective
    • Généraliser le tiers payant Complément Mode de Garde (CMG)
    • Prolonger le CMG jusqu’à l’entrée effective à l’école
    • Expérimenter des chèques accueil Petite Enfance
    • Augmenter le plafond et abaisser le plancher de ressources dans le calcul des participations familiales en crèche sous PSU
    • Augmenter le taux pilote de 2 % par an sauf pour les faibles revenus
    • Réduire la participation financière des familles monoparentales dans les EAJE
    • Appliquer un barème unique pour les crèches collectives, familiales et micro-crèches en PSU
    • Faire concorder le Crédit d’impôt (et revaloriser le plafond) au prélèvement de l’impôt à la source
  • Réduire les inégalités territoriales d’accès aux modes d’accueil en s’appuyant sur le rôle central des schémas départementaux des services aux familles qui devrait prévoir l’identification des zones déficitaires, de fixer des objectifs et d’y faire correspondre toutes les solutions disponibles (EAJE, RAM, MAM, LAEP, centres sociaux…)

 

  • Garantir l’accessibilité à tous, quelque soit la situation familiale, professionnelle ou familiale :
    • Prévoir que les schémas départementaux des services aux familles puissent proposer des solutions localement adaptées aux besoins spécifiques des familles
    • Recenser les ressources locales
    • Constituer un référentiel des bonnes pratiques
    • Généraliser l’outil Filoue
    • Inciter les gestionnaires à plus de transparence dans les critères et procédures d’attribution des places en crèches
    • Redonner une vraie place aux accueils temporaires (halte-garderies et jardins d’enfants)
    • Sécuriser financièrement les structures accueillant des publics aux besoins spécifiques
    • Faciliter la labellisation des crèches AVIP
    • Supprimer la condition de l’emploi pour bénéficier du CMG
    • Prévoir une majoration du CMG pour horaires atypiques
    • Prévoir et bonifier le financement des crèches familiales pour des places réservées aux familles ayant des besoins spécifiques et notamment les familles en situation de précarité, en parcours d’insertion, en horaires atypiques ou ayant des enfants en situation de handicap
    • Renforcer l’accompagnement des familles et le soutien à la parentalité
    • Combiner les accueils individuels et des temps collectifs
    • Former et soutenir les professionnels sur l’accueil des familles ayant des besoins spécifiques (handicap, familles précaires, etc.)

Du côté quantitatif

Les pistes pour les financements

Des inégalités sont pointées sur différents axes de financement :

  • Les financements publics sont inégaux selon le mode d’accueil : “environ 16 100€ pour une place en EAJE, 9 000€ par enfant gardé par une assistante maternelle, 10 300€ pour une garde à domicile et 5 900€ pour un enfant en préscolarisation “, en 2016
  • Les financeurs sont très hétérogènes : les collectivités territoriales ne financent que les EAJE et les écoles
  • La contribution nette des familles peut passer du simple au double
  • Le coût de création et de fonctionnement des berceaux  diffère selon le type de gestionnaire

 

Le HCFEA préconise de :

  • Réduire les inégalités du reste à charge pour les familles pour harmoniser le coût quelque soit le choix de mode d’accueil
  • Faire évoluer les outils de financement pour conserver un dynamisme dans le développement de l’offre d’accueil et la pérennisation des structures
  • Augmenter l’effort de l’état en direction de l’accueil individuel : par une meilleure structuration de l’offre et un soutien aux professionnels pour améliorer la qualité d’accueil
  • Prioriser l’ouverture de places en accueil collectif aux enfants de plus de 2 ans (leur coût de fonctionnement est 35 % moins élevé)

Les propositions pour l'accueil collectif

“L’accueil collectif reste le mode d’accueil plébiscité par les familles. Or si le développement de places en EAJE s’est poursuivi, c’est à un rythme moins soutenu que celui prévu (2/3 de l’objectif) qui traduit un relatif désengagement des collectivités territoriales. Un tiers de ce développement tient en effet à la création de micro-crèches privées qui optent, pour la grande majorité d’entre elles, pour un financement par le complément de libre choix du mode de garde de la prestation d’accueil du jeune enfant (CMG de la PAJE).”

Afin de sortir de cette tendance de désengagement des collectivités territoriales, le rapport prévoie de :

  • Mobiliser les plans crèches et notamment en  :
    • Statuant sur la surface utile par enfant
    • Passant d’une aide forfaitaire à une prise en charge proportionnelle au coût du projet (en prenant en compte les variations de charges selon les territoires)
    • Créant des postes de “déléguées structure Petite Enfance”, chargés d’accompagner et de conseiller les gestionnaires dans la maîtrise de leus coûts de financement et d’investissement
    • Assurant la continuité de base de financement entre 2 COG
    • Simplifiant les démarches administratives des porteurs de projet

 

  • Eviter que la PSU ne pénalise la pérennité des structures (la limitation des congés et absences des enfants est une piste)

 

  • Harmoniser les systèmes de financement (PSU/PAJE – Commercialisation aux entreprises – CEJ – Fonds de rééquilibrage territorial – …) et en les adaptant au contexte de chaque structure (accueil atypique, prise en charge du handicap, parents en situation de précarité, …). Agnès Buzin, Ministre de la santé, a déjà annoncé l’une des mesures intégrées à la future COG : le bonus financier accordé systématiquement aux communes créant des places pour les familles pauvres et/ou en situation de handicap.
  • Identifier les facteurs de fermeture des structures pour mettre en place des actions de prévention (dispositif de suivi pour repérer les structures en difficultés financières, mesures d’accompagnement, aides financières d’urgence)

Les propositions pour les Assistants Maternels

Le HCFEA constate une baisse de l’offre d’accueil d’assistants maternels (qui reste toujours le 1er mode d’accueil des jeunes enfants) liée :

  • Au manque d’attractivité de cette profession (reconnaissance professionnelle, perspectives d’évolution en termes de carrière, modalités d’exercice, rémunération, …)
  • Au manque d’attractivité pour les familles (formation, capacité d’éveil et de socialisation..)
  • A l’accessibilité financière
  • A un manque de structuration de ce marché (information, mise en relation entre professionnels et familles..)
  • Aux difficultés liées à la relation contractuelle employeurs/employés
  • A une inadéquation territoriale entre l’offre (Assistants Maternels) et la demande (parents)
  • Au faible soutien financier des pouvoirs publics

 

Le HCFEA inscrit donc à son programme de travail les actions suivantes :

  1. Une conférence de relance de l’attractivité de la profession d’assistante maternelle
  2. Une étude sur l’importance de l’inadéquation géographique entre offre et demande d’assistantes maternelles

Il préconise également de faire promouvoir ce type d’accueil en :

  • Renforçant le maillage territorial des RAM (Relais Assistants Maternels) avec plus de soutien financier
  • Réaménageant les crèches familiales pour les relancer
  • Consolidant l’organisation et la pédagogie au sein des MAM (Maison d’Assitants Maternels)
  • Faisant évoluer le Complément Mode de Garde (CMG) pour réduire l’effet de désolvabilisation des familles qui s’accentue

Les propositions pour les RAM

Maillon identifié comme fondamental dans la consolidation de l’offre d’accueil individuel, les Relais Assistants Maternels doivent être promus à la hauteur des impacts qu’ils peuvent générer.

“Services reconnus dans le paysage institutionnel de la petite enfance, les RAM jouent un rôle réel dans la structuration de l’offre d’accueil individuel et de certaines articulations avec l’accueil collectif par une information et une mise en relation entre les parents et les professionnelles. Ils participent également à la professionnalisation du métier d’assistante maternelle et de garde d’enfant à domicile et ce faisant, a priori à l’amélioration de la qualité de l’accueil. Le développement quantitatif et qualitatif des RAM apparaît ainsi comme un moyen de rendre plus attractif les modes d’accueil individuels pour les familles, mais également le métier d’assistante maternelle, et de lutter contre la sous-occupation de places d’accueil.”

4 idées de développement sont envisagés pour les développer :

  • Redéfinir leurs missions autour de 4 axes principaux :
    • Le soutien aux parents dans la recherche d’un mode d’accueil et la structuration de l’offre
    • Une meilleure professionnalisation des assistantes maternelles et des gardes à domicile
    • L’éveil et la socialisation des enfants reposant sur des temps réguliers en groupe autour d’une animation, de jeux et d’activités conçus pour eux
    • L’observation des conditions locales d’accueil du jeune enfant (recensement de l’offre et de la demande, participation aux instances de la politique locale Petite Enfance et à l’élaboration du schéma départemental des services aux familles

 

  • Majorer le financement des RAM en fonction de la qualité du service (surcoût lié aux élargissements d’horaires d’ouverture, recrutement, mise à disposition de locaux) et augmenter la prise en charge financière des RAM par la branche famille

 

  • Atteindre une couverture nationale des RAM et favoriser les actions innovantes et adaptées localement (RAM itinérants, partage de locaux et de compétences EAJE/RAM ou LAEP/ RAM, etc.)

 

  • Augmenter la fréquentation des RAM (en conditionnant l’agrément des assistants maternelles à leur inscription à un RAM, en communiquant auprès des professionnels et des familles voire réfléchir à un nouveau nom pour intégrer la garde à domicile)

Avec un objectif que tous les assistants maternels dépendent d’un RAM, le tableau suivant prévoit la création de près de 1 400 RAM et donc au moins autant de postes à pourvoir pour les animer.

Les propositions pour les crèches familiales

Maillon faible des EAJE depuis 15 ans, les crèches familiales représentent moins de 10 % de l’offre d’accueil. Afin de faire cesser ce déclin, le HCFEA préconise de :

  • Clarifier le cadre juridique
  • Mener une étude sur les conditions salariales d’exercice en crèche familiale
  • Communiquer sur les intérêts de la crèche familiale, autant auprès des professionnels que des familles
  • Financer de façon plus adaptée (par place et non plus par heure, mais aussi en cas d’accueil spécifique ou de mutualisation de locaux)
  • Promouvoir la formation pour des perspectives d’évolution de carrière

Les propositions pour les MAM

En plein essor ces dernières années, c’est l’absence de cadre des Maisons d’Assistants Maternels qui inquiète les instances. Il y aurait ainsi besoin de :

  • Les intégrer dans la future COG et les identifier dans l’offre existante au niveau local
  • Les promouvoir comme solution alternative dans des contextes locaux spécifiques
  • Les soutenir dès la création du projet, et d’en assurer un examen et une validation par une instance
  • Les étudier pour identifier les facteurs de réussite et d’échec
  • Les inscrire auprès des RAM et sur le site mon-enfant.fr
  • Prévoir des modalités de résolution de conflits entre professionnels et prévoir la sortie éventuelle de l’un d’eux

Un besoin de réformer la gouvernance de la politique d’accueil du jeune enfant

Dans le schéma actuel

“Une politique éclatée qui souffre d’un manque de pilotage et de coordination”

La Petite Enfance est effectivement l’affaire d’acteurs et de financeurs multiples sans chef d’orchestre désigné, et sans caractère obligatoire de compétence Petite Enfance, à l’exception des Conseils Départementaux (au travers de la PMI).

Le HCFEA préconise donc, pour améliorer le mode de gouvernance actuelle de :

  • Reconnaître et désigner la CNAF et les CAF comme pilotes ou coordonnateurs de la politique d’accueil du jeune enfant
  • Consolider les schémas départementaux de services aux familles et les commissions départementales des services aux familles (CDSF)
  • Simplifier les démarches administratives des porteurs de projet par la création de guichets uniques administratifs ou par le renforcement des attributions des CDSF
  • Expérimenter de nouvelles modalités de gouvernance sur la base du volontariat des acteurs de nouvelles modalités de gouvernance ou de répartition des responsabilités entre acteurs

Ou en inventant un autre modèle

Malgré ses préconisations pour permettre de renforcer le schéma actuel, le HCFEA craint qu’elles ne soient insuffisantes pour être à la hauteur des enjeux de la Petite Enfance. Il propose donc que soit concrètement confiée à un seul acteur déterminé (communes/intercommunalités, Département ou CNAF) la compétence Petite Enfance. Cela permettrai ainsi de simplifier et rationaliser le dispositif et donc de gagner en efficacité.

Le contenu de cette compétence tiendrait sur 5 niveaux :